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Expulsions de sans-papiers : associations contre policiers

Expulsions de sans-papiers : associations contre policiers

Expulsions de sans-papiers : associations contre policiers
Mis en ligne le mercredi 3 septembre 2008 ; mis à jour le jeudi 4 septembre 2008.

Publié dans le numéro IX (mai-juin 2008)

cf aussi :
- Une nuit à Roissy
- Rencontre avec un agent d’escale commercial

Les aéroports français sont devenus des lieux emblématiques dans les expulsions de sans-papiers. Accompagnés de policiers et entravés, les « reconduits » sont placés à l’arrière d’avions de ligne traditionnels. Policiers comme associations savent que les passagers peuvent jouer un rôle essentiel, puisque le commandant de bord, maître à bord de son avion, a le droit de refuser l’expulsion si le bon déroulement du vol lui semble compromis. Revue de textes.

En juillet 2000, le Collectif anti-expulsions d’Île-de-France publiait un Guide pratique d’intervention dans les aéroports : « Le plus important est de discuter avec les passagers, de leur expliquer la situation. Deux ou trois personnes suffisent et il n’est pas absolument nécessaire d’avoir un tract à distribuer (cela peut donner matière à interpellation). [...]

Dire aux passagers qu’ils peuvent montrer leur refus en restant debout, en manifestant verbalement leur désapprobation, en refusant de boucler leur ceinture... Nous conseillons aux passagers d’éviter tout contact avec les policiers qui escortent l’expulsé parce que ce ne sont pas eux qui décideront de le débarquer et parce que les policiers répondent souvent par des provocations et de simples insultes peuvent donner un prétexte d’inculpation. Il vaut mieux ne s’adresser qu’au personnel de l’avion et demander au commandant de bord de débarquer le S.P.

Vous pouvez essayer de susciter un débat entre les passagers pendant l’enregistrement, de manière à ce que l’information circule plus vite et pour qu’ils s’organisent pour réagir collectivement dans l’avion. Si la discussion se passe bien avec certains passagers, demandez leur leurs coordonnées et donnez-leur les vôtres. Il est très utile de pouvoir les contacter après le vol pour qu’ils vous racontent ce qui s’est passé et éventuellement qu’ils envoient leur témoignage au tribunal.

Si certains passagers sont peu sensibles au problème des expulsions, ils peuvent être réceptifs à un argument concernant leur sécurité  : un expulsé qui ne veut pas partir peut se débattre en vol et mettre en péril la sécurité de tous les passagers. [...] Rester après la fin de l’embarquement pour regarder si le vol a du retard sur les écrans d’affichage. Un retard non prévu, surtout s’il se prolonge, peut être le signe que l’embarquement se passe mal et que le sans-papiers va être débarqué. N’hésitez pas à harceler le personnel de la compagnie et de l’aéroport pour savoir ce qui se passe. » Un guide plus général consacré aux expulsions de sans-papiers a été rédigé fin 2007. Mis en ligne sur internet (http://sanspapiers.internetdown.org), il consacre quatre pages aux aéroports (cf. au bas de cet article).

En décembre 2006, le site internet de la CGT de Roissy (ulcgtroissy.fr) rendait publique un « Notice d’information » que distribuait la Police de l’air et des frontières (PAF) aux voyageurs pour les dissuader d’intervenir lors d’expulsions de sans-papiers (page suivante). Un texte qui annonce les peines prévues, se gardant bien de rappeler que les peines indiquées sont les maximales prévues. Dans les faits, les passagers qui s’opposent aux expulsions sont soit relaxés, soit condamnés à des amendes, la plupart du temps avec sursis.

Le 27 février 2008, des passagers du vol Paris-Casablanca se voient remettre un texte encore plus long :

« Mesdames, Messieurs,

Vous avez peut être été sollicité, à titre personnel ou pas des incitations, pour vous opposer à l’embarquement d’une personne expulsée de France en vertu d’une décision légale prise par une instance administrative ou judiciaire et qui embarquera sur le vol que vous empruntez aujourd’hui.

Les éléments suivants doivent être portés à votre connaissance, afin que nul n’en ignore :

La décision de reconduite d’un étranger est un acte légitime de l’Etat français, qui s’exécute après que toutes les voies de recours aient été épuisées. [Suivent les mentions des peines, comme dans les pages ci-dessous] Nous vous prions de ne pas vous associer à cette consigne et de respecter scrupuleusement les instructions de sécurité de la compagnie aérienne, lors des phases de roulage et de décollage de l’appareil

Le directeur de la PAF de Roissy Charles-de-Gaulle » (1)

Malgré cette lettre, ce jour-là, des passagers s’opposent à l’expulsion de sans-papiers encadrés par des policiers installés à l’arrière. Plusieurs d’entre eux sont placés en garde à vue et mis en examen pour entrave à la circulation d’un aéronef (2).

Par ailleurs, le 22 novembre 2006, Didier Hassoux avait publié dans Le Canard Enchaîné des extraits d’une brochure de 70 pages intitulée Instructions relatives à l’éloignement par voie aérienne des étrangers en situation irrégulière et destinée aux policiers chargés d’accompagner les vols charters entièrement : « une fiche technique, dite «moyen de contrainte et régulation phonique», est fournie aux escorteurs. En clair : comment faire taire les sans-papiers ? En huit photos parlantes, et autant de légendes explicites, le policier apprend ainsi à «entourer le cou du reconduit avec son bras» et à lui «imprimer un mouvement de rotation», puis «à maintenir cette pression entre trois et cinq secondes pour assurer la contrainte de régulation phonique». Traduit du langage emprunté aux arts martiaux : c’est un étranglement. En tout petit, la fiche technique précise que la répétition de cet exercice ne peut excéder cinq minutes. Juste le temps de réduire au silence les récalcitrants. »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1. Cité par educationsansfrontieres.org

2. Dépêche AFP du 28/02/08.

 

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