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Vide

Vide

Vide
Mis en ligne le mercredi 29 août 2007.

Publié dans le numéro V (septembre 2007)

Antoine, 24 ans.

 

Le vide, c’est polarisé. C’est-à-dire que il y a deux définitions de vide, où c’est une tension entre deux choses. D’un côté, c’est le manque, c’est-à-dire l’absence de tout, quelque chose qui immobilise, qui bloque, qui empêche, qui cloue, qui rend immobile. Et de l’autre côté, le vide à un moment ça peut devenir un moteur, comme un appel d’air, quelque chose qui amène le mouvement et qui est aussi l’espace dans lequel on peut bouger. S’approcher des gens, s’en éloigner, être seul, pas seul, être un peu avec des gens mais jusqu’à une certaine limite. Donc c’est ces deux choses. Voilà, en ce moment, je suis avec un garçon, mais on n’est pas vraiment ensemble, on se dit pas qu’on est ensemble ou alors c’est quand on gaffe et on dit « merde... » Moi maintenant je me rends compte que dans l’histoire que j’ai avec lui, dans la manière dont je me projette avec lui, le vide il est tout le temps là. Comme il a été beaucoup là dans ma relation d’avant, cette relation qui était justement immobilisante, clouante, quelque chose qui me scotchait au mur, et là maintenant je me rends compte que je joue avec, ça devient une espèce de moteur, à des moments où je... C’est quelque chose qui m’amène, qui m’aspire vers lui, et puis à des moments au contraire, j’arrive à laisser cette distance, et on se ré-éloigne, etc. Et du coup on a une relation assez belle, assez inédite, enfin, moi je trouve, dans le sens où à l’intérieur de ce vide, qui nous anime tous les deux, parce que je pense que tous les deux on est travaillés par cette question du manque, et ben on arrive à bouger énormément, à se dire énormément de choses, avec des choses très belles, et à la fois, on a rien dit, on n’a pas dit un seul mot, on n’a pas nommé, on n’a pas dit qu’on était ensemble, on n’a pas dit qu’on était un couple, et du coup ça laisse une liberté, l’absence de définition, finalement, qui est vachement joyeuse, quoi. Là ce soir je rentre à Paris, je suis dans le train, concrètement, entre Nevers et Paris, et je ne sais pas si je vais le retrouver, je ne sais pas si il va me téléphoner, demain, après-demain, et si moi je vais lui téléphoner, si il sera au bout du fil ou pas. Il y a ce vide, cette absence, je sais pas, et on danse au milieu, c’est vachement beau.

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